60 ans de carrière! À l’heure du zapping et des artistes prêts à diffuser, le chiffre donne le vertige. Et pourtant… À 76 ans, Michèle Torr continue de chanter et se remémore les premières heures de son parcours.
La consonance de son patronyme aura sans doute éveillé la curiosité de quelque inconditionnel des légendes nordiques. Torr, comme le dieu des orages et du tonnerre, comme le fils d’Odin et le pourfendeur de Jörmungandr, le gigantesque serpent des dieux… Mais dans
l’histoire de Michèle, il n’y a point de guerre, de haine ou de vengeance. Seul un éclair de génie et un coup de foudre viennent lier la chanteuse aux Asgardiens. Le coup de génie? Il est venu tour à tour dans le choix d’une chanson, d’un parolier ou d’une mélodie précieuse. Le coup de foudre ? C’est celui d’un public aimant, d’un public fidèle depuis soixante ans. Soixante ans durant lesquels linterprète s’est maintenue au rang des grandes vedettes de la chanson française. Lorsque l’on embrasse la période allant du milieu des années 1960 à nos jours, on comprend aisément le défi relevé par l’avignonnaise. Elle a survolé les yé-yé, le disco, le rock, le rap, la techno, la pop et tous les sous-courants qui les ont jalonnés. Le tout, avec la constance et la cohérence des vrais artistes.
Un coup de bluff
Tout a commencé par un pari audacieux. En 1962, Michèle se présente sans trop y croire au concours « On chante dans mon quartier ». L’opération est montée par la mairie d’Avignon et vise, déjà à l’époque, à découvrir de nouvelles stars. La jeune fille décide d’y interpréter le thème d’un film, Exodus, sorti en salle deux ans plus tôt.
Le challenge est relevé puisque la première voix associée à la chanson n’est autre que celle d’Édith Piaf. Mais qu’à cela ne tienne ! Michèle Torr y va et remporte finalement le concours haut la main. Elle coiffe même sur le poteau une autre provençale qui, très rapidement après, se fera également un nom : Mireille Mathieu. « J’y suis allée pour me tester. Je voulais savoir ce que je pouvais faire », se remé-more-t-elle. Avec le succès obtenu dans la cité des Papes, Michèle Torr décroche la première partie de Jacques Brel en concert et sort son tout premier album quelques mois plus tard. Le titre de cet album, comme un cri de ralliement de toute une génération: C’est dur d’avoir seize ans.