A 76 ans, la chanteuse fête soixante ans de carrière et la sortie d’une intégrale.
En concert le 6 janvier en Belgique, elle égrène ses souvenirs avec nous.
Cine Tele Revue:
Pour fêter vos soixante ans de carrière, vous revenez en Belgique lors d’un concert unique, au Centre culturel d’Auderghem.
Michele Torr :
Oui, ça faisait longtemps! Je n’ai que des bons souvenirs de la Belgique et je suis heureuse de revenir, et déjà cette semaine, juste avant les letes. car vous avez vraiment le sens de Noel.
CTR :
Vous publiez aussi ‘intégrale de vos chansons.
MT :
Au début, je n’étais pas emballée. Je n’ai pas le goût du passe. Qui cela allait-il intéresser? On a réussi à retrouver 465 chansons et, finalement. j’ai adoré. J’ai redécouvert des choses et, dans la foulée. ai eu envie de faire une salle à Paris. aux Folies Bergère. Cette salle a une valeur sentimentale. Quand je suis arrivée à Paris, a 16 ans. faire mon premier disque, j’habitais une chambre de bonne au 6, au 33, rue Bergère, avec ma maman et ma petite sour. Brigitte.
CTR :
Votre maman a tenu un rôle essentiel…
MT :
Elle m´a suivie à Paris, papa restant travailler en Provence. Pour moi, c’était le paradis, mais j’imagine que pour eux, pour elle, devenue femme de chambre à l’hôtel Bergère, ça a dû être difficile. Elle a un peu vécu par procuration son rêve d’être chanteuse. Elle avait failli y arriver. Mais ma grand-mère n’a pas voulu. Ce n’était pas un métier convenable!
CTR :
Elle vous a inscrite, à 6 ans, à un radio-crochet.
MT :
J’ai chante Bonbon, caramel… ».d’Anne Cordy, avec un petit costume d’ouvreuse de cinéma, et je lançais des bonbons! Mon premier concours, que j’ai gagné, s’il vous plaît! Quand on m’a applaudie. j’ai eu des frissons partout!
Après. un moment important a été le radiocro-chet à Avignon, en 1962, où j’ai remporté la finale en chantant « Exodus », d’Edith Piaf. J’ai gagné 120 francs et, surtout, la possibilité, à 14 ans, de passer en première partie de Jacques Brel, c’était énorme. Apres l’avoir vu sur scène, je pleurais d’émotion. Je n’ai jamais rien vu d’aussi fort.
CTR :
Que pensez-vous des émissions de télé-réalité comme « Star Academy »?
MT :
Je ne les suis pas, mais j’entends parfois des voix magnifiques. Ce qui m’étonne le plus, c’est leur aplomb, leur aisance, comme s’ils avaient dix ans de métier. Je ne regarde pas parce que je n’aime pas donner de conseils et je ne supporte pas que des artistes en donnent à des débutants.
Moi, je ne les ai jamais écoutés. Mireille, du Petit Conservatoire de la chanson, m’en a donné.
Elle ne m’a dit que des conneries! C’est un métier d’instinct, qu’on apprend sur scène. On le ressent ou pas. Quand je vois qu’on leur fait faire de la gymnastique, ça me fait rigoler!
CTR :
Vous appartenez à la génération yéyé, vous êtes sur la « photo du siècle » de Jean-Marie Périer!
MT:
C’était important d’y etre. On attendait Johnny, qui est arrivé au dernier moment et est monte sur l’echelle, bien en vue. Sylvie était ravissante avec son gros ventre, elle attendait David. C’était une époque joyeuse. On chahutait beaucoup. Des années avant. j’avais failli faire un duo avec Johnny. Mon premier disque venait de sortir, ça marchotait, je n’avais pas un sou. pas une robe à me mettre, et je me retrouve au gala de l’Union. Johnny faisait un numéro équestre. Il etait beau comme un dieu. On était toutes folles de lui! On nous présente et on fait une photo. J’ai bu dans son verre, en fan! Johnny dit que ce serait bien qu’on fasse un duo. Je ne me sentais plus! Plus tard, je le revois et lui en reparle. Seulement, entre-temps, il avait rencontré Sylvie, et il m’a raconté un bobard pour expliquer que ca tombait à l’eau!
CTR :
Il y a eu des drames aussi. Comme avec votre maman…
MT :
Le premier cadeau que je lui ai offert quand ça a marché pour moi, ça a été une voiture. Cette voiture avec laquelle elle a eu son accident. Je chantais à l’Alcazar, à Marseille, avec Claude François, ce soir-là. le 28 décembre. J’avais 18 ans, ma seur, 9. Il a fallu continuer à avancer..
CTR :
Vous avez beaucoup tourné Claude François.avec
MT :
Mon premier Olympia, c´etait avec lui, en novembre 1964! Puis j ai fait des tournées avec lui. On sait qu’il avait un drôle de caractère, mais avec moi, il a été adorable. J’avais beaucoup d’admiration pour lui. Il était tellement professionnel, c’était un exemple.
CTR :
Vous étiez une pionnière parmi les chanteuses a voix.
MT :
Oui, j’étais un peu à part, d’ailleurs, j’étais celle qui chantait bien! Je trouve qu’il y a de la place pour tout le monde. Parmi les jeunes. Certains sont vraiment intéressants, comme Vianney, Louane, Chimène Badi.. Puis il y a Celine Dion, bien sûr, qui a débuté en reprenant mes chansons. Je l’ai vue à 14 ans, avec ses cheveux qui frisaient, ses dents qui se chevauchaient, mais cette voix, déjà! Je voulais la féliciter, et là, quand elle me voit, elle s’écrie: « Maman, viens voir, ta chanteuse préférée est là!